C’est en partie à cause d’Internet que l’on doit l’essor de la contrefaçon des médicaments depuis ces dernières années. Bernard Leroy, directeur de l’Institut de Recherche Anti-Contrefaçon de Médicaments en France parle de la contrefaçon de médicaments comme d'un « chiffre noir ».1Cette nouvelle forme de criminalité paraît très inquiétante puisqu’elle recouvre une grande partie des réseaux de la « cyberpharmacie ».
Selon l’Organisation
mondiale de la Santé, 50 % des médicaments issus du marché en ligne, d’Internet
sont frauduleux et représenteraient 10% du marché pharmaceutique.2
Il
n’existe pas de définition universelle du produit contrefait, elle
varie selon les pays et la règlementation en vigueur. L’Organisation
mondiale de la Santé donne cette définition « un
produit qui est délibérément et frauduleusement muni d'une étiquette
n'indiquant pas son identité et/ou sa source véritable »3 en y incluant les génériques.
Médicaments contrefaits : un enjeu majeur de la
santé publique
Les médicaments
contrefaits sont un enjeu majeur pour la santé publique, ils posent
également de gros problèmes d’ordre économique et de propriété intellectuelle.
Ces nouveaux produits trompent volontairement le consommateur :
- Un conditionnement falsifié : emballages et étiquetages erronés sur l’identité ou/et sur
l’origine du produit. Dates faussées, le médicament peut être ainsi périmé
depuis bien longtemps.
- Une composition compromise :- le principe actif est bon mais mal dosé,- le principe actif est inexistant,- il ne s’agit pas du bon principe actif,- le produit comporte des substances toxiques comme de la mort aux rats, de l’arsenic, du ciment…4
Dans tous les cas, ces
médicaments peuvent provoquer chez le patient des complications, des effets indésirables
et parfois même la mort. Ils mettent en péril la vie du « patient »
en l’écartant d’un soin thérapeutique approprié et en aggravant son état de
santé.
L’absence ou le faible
dosage du principe actif entraîne des dégâts sanitaires importants parfois même
irréversibles. Dans le premier cas, la pathologie n’aura jamais été traitée et
peut même évoluer et dans le second cas, l'organisme pourrait déclencher une
pharmaco-résistance rendant la personne encore plus vulnérable face à la
maladie.
Dans tous les cas, il y a un danger de mort
Contrefaçon : quelles maladies et quels
médicaments sont concernés ?
La contrefaçon existe
partout dans le monde et concerne autant les marques déposées que les
génériques.
Elle concerne le
traitement d'à peu près toutes les maladies, malines ou bénignes comme
l’asthme, la grippe, le rhume, le cancer, les cardiopathies, le diabète, le
cholestérol, la schizophrénie etc… et un large panel de médicaments.
Selon une étude, dans
les pays développés, les produits amaigrissants se hissent en tête devant les
traitements antigrippaux.5 Les médicaments qui pallieraient aux troubles de
l’érection, comme le viagra connaissent aussi un grand succès dans les pays
industrialisés.
Médicamentation frauduleuse : une infiltration
sournoise du web
50%
des médicaments vendus en ligne seraient contrefaits et 96% des sites sont
illégaux.6
Pour faciliter l’accès
aux soins, certains pays ont autorisé la vente en ligne de médicaments ne
nécessitant pas de prescription médicale. C’est le cas de la France, de
l’Allemagne, du Portugal, etc. Pour ces pharmacies virtuelles, elles doivent se
conformer à un cadre légal strict.
Malgré tout, bon nombre de pharmacies clandestines opèrent en toute illégalité
sur Internet en vendant des médicaments frauduleux qui requièrent pourtant une
ordonnance. Pour cela,
elles n’hésitent pas à dissimuler leur véritable identité et/ou leur
réelle localisation.
Comment ne pas tomber dans les mailles de
la Toile ?
- Les imitations de logos sont simples à effectuer.
Certaines pharmacies virtuelles affichent une fausse certification
qui justifierait leur activité.
- Pour plus de sureté : Santé Canada, l’Ordre
des pharmaciens canadiens, le Ministère de la santé et l’Ordre des
pharmaciens français, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des
produits de santé (ANSM) mettent à disposition sur leur portail les listes
officielles des pharmacies en ligne habilitées à exercer ainsi que
l’ensemble des médicaments autorisés à la vente sur Internet.
- La vente en ligne des médicaments doit respecter
une certaine réglementation. Elle est réservée au pharmacien seulement si
le site est adossé à une officine pharmaceutique physique. Seuls les
médicaments non soumis à une prescription médicale sont vendus.
- Le simple drapeau ne justifie pas la localisation
- Ignorez ou supprimez les spams qui proposent
l’achat de médicaments qui sont généralement illégaux.
- Evitez de divulguer toutes informations
personnelles sur votre santé
- Méfiez-vous des prix trop attractifs
Pourquoi avoir recours aux produits contrefaits ?
Il est difficile
d’identifier quantitativement la part des médicaments contrefaits sur le marché
économique mais on sait qu’elle avoisinerait les 1 % 6 dans
les pays industrialisés comme certains pays d’Europe, le Canada, le Japon ou
encore l’Australie contrairement aux pays d’Afrique, certaines régions d’Asie,
en Amérique Latine, où on atteindrait les 30%.6
Certaines personnes vont se tourner vers ces produits illégaux
car :
- Ils sont moins chers. Le système de l’assurance
maladie n’est pas le même dans tous les pays. Dans certaines régions, se
soigner est un luxe et l’achat de médicaments représente un budget conséquent
qui n’est pas accessible à tout le monde. Aussi, même avec une protection
sociale de qualité, comme en France, certains médicaments ne sont pas
remboursés par la sécurité sociale, alors l’idée d’acheter en ligne à moindre
coût est tentante.
- par manque d’approvisionnement, de dispensaires ou
d’organismes sanitaires réglementés, elles ne trouvent pas ce dont elles ont
besoin dans leur pays.
- dans leur pays les médicaments ne sont pas
autorisés, ils nécessitent une prescription médicale ou ne bénéficient pas
d’une autorisation de mise sur le marché (AMM).
La mondialisation,
la corruption et le nouveau commerce en ligne semblent favoriser cette nouvelle
économie frauduleuse et mortelle.
A qui profite le crime ?
Totalement
illégale, meurtrière et au profit d’une économie souterraine, la contrefaçon de
médicaments apporte plus de bénéfices, pour ceux qui la pratiquent, que le
trafic de drogues comme celui du cannabis.7
Pour le
contrefacteur, sa micro-industrie n’entraîne pas de cotisations sociales, pas
d’impôt sur société, pas de redevance aux marques, pas de coût à l’exportation.
En l’absence de réglementation et en multipliant les intermédiaires, le
contrefacteur accroît largement son bénéfice tout en se démarquant de la
concurrence légale, il propose alors des tarifs qui frôlent la dérision.
Dans certaines zones géographiques, il est difficile d’établir un réel contrôle
de la BPF (bonnes pratiques de la fabrication) par manque de compétences,
de réglementation stricte et de moyens.
La
falsification des produits est de plus en plus sophistiquée se réduisant
parfois à un détail sur l’emballage ou à des différences de tailles
minimes entre le produit officiel et celui qui est falsifié.
La
contrefaçon des médicaments n’utilise pas le circuit de distribution
protocolaire et contrôlée par les autorités sanitaires. Elle ne répond pas aux
règles sécuritaires de fabrication, de conditionnement et de distribution.
Acheter
des médicaments en ligne n’est pas anodin. Ce simple clic peut être fatal...
Sources
1. IRACM : Institute of Research Against Counterfeit
Medecines, l’Institut de Recherche Anti-Contrefaçon de Médicaments (IRACM).
2. Médicaments faux/faussement
étiquetés/falsifiés/contrefaits Aide-mémoire N°275 Mai 2012, l’organisation
mondiale de la santé.
3. Contrefaçon de médicaments : dangers, problèmes et
solutions possibles, Dr Sabine Kopp, Assurance de la qualité et innocuité des
médicaments Organisation mondiale de la Santé.
4. Propose de Wilfrid Rogé directeur adjoint de l’Institut de
Recherche Anti-Contrefaçon de Médicament sur France info, publié le 25
septembre 2013 sur le portale de l’iracm.
5. Guide à l’usage des pharmaciens, médicaments et
contrefaçons.
6. Dossier de presse, responsabilité sociale de l’entreprise,
la lutte contre la contrefaçon des médicaments, sanofi.
7. Propos de jean christophe marten perolin, colloque : la
contrefaçon des médicaments, police judiciaire, brigade centrale pour la
répression des contrefaçons industrielles et artistiques.
8. Colloque : la contrefaçon des médicaments dont les acteurs
sont entre autres le docteur Amor Toumi de l’organisation de santé, Jacques
Franquet directeur de la socitété générale sanofi aventis, phillipe keaney
directeur des douanes, stefan fûrhing direction général entreprises et
industrie.
9. Bulletin de l’organisation mondiale de la santé, la menace
croissante des contrefaçons de médicaments.
10. rapport d’études : contrefaçons de médicaments et
organisation criminelles.
11. ordre des pharmaciens du québec : l’achat des médicaments
en ligne attention !
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